Sortir du mythe du “profil parfait” pour recruter durablement,
ce que disent les chiffres… et ce que montre le terrainLes difficultés de recrutement ne concernent plus uniquement certains secteurs ou niveaux de qualification. Elles traversent aujourd’hui l’ensemble du marché du travail. À l’occasion du séminaire de directions SEVE, les échanges ont permis de croiser les enseignements des études récentes de l’APEC et de la DARES avec les pratiques de terrain des structures de l’insertion par l’activité économique (SIAE). Un constat s’impose : la négociation est déjà largement pratiquée pour les postes de cadres, alors pourquoi ne pas l’étendre à tous les recrutements ?
Selon l’APEC, en 2022, la quasi-totalité des entreprises (91 %) ont dû ajuster leurs critères pour faire aboutir leurs recrutements de cadres.
Parmi les principaux leviers mobilisés :
- La revalorisation de la rémunération initialement prévue (62 % des entreprises),
- L’assouplissement des critères de profil : près de 8 entreprises sur 10 ont recruté des cadres avec moins d’expérience ou de compétences techniques qu’initialement souhaité,
- L’adaptation des exigences en matière de diplôme pour près d’un tiers des entreprises,
- Des aménagements des conditions de travail : 4 entreprises sur 10 se disent prêtes à accepter le temps partiel ou à proposer des avantages supplémentaires (véhicule de fonction, par exemple).
Ces chiffres montrent que, pour les cadres, la négociation fait déjà partie intégrante du recrutement.
Du côté de la DARES, une étude publiée en mai 2022 met en lumière les causes structurelles des difficultés de recrutement. Les employeurs évoquent majoritairement :
- un décalage entre les compétences attendues et celles des candidats,
- mais aussi des pratiques de recrutement perfectibles : salaires peu attractifs, conditions de travail contraignantes, exigences excessives, moyens insuffisants consacrés à l’embauche.
Autrement dit, l’appariement entre l’offre et la demande de travail est souvent freiné non pas par l’absence de candidats, mais par des attentes trop rigides.
Si les entreprises savent adapter leurs exigences pour recruter des cadres, rien ne justifie que cette logique ne s’applique pas à l’ensemble des métiers, y compris ceux occupés par des personnes en parcours d’insertion.
Les échanges du séminaire SEVE ont mis en évidence une conviction partagée : la médiation active est un levier clé pour réduire l’écart entre les besoins réels des entreprises et les profils disponibles.
Les directions SEVE ont partagé de nombreux leviers concrets pour faciliter la négociation avec les entreprises :
Structurer le partenariat
- Donner un cadre clair à la relation avec l’entreprise,
- Inscrire le partenariat dans la durée et assurer un suivi après l’embauche,
- Ne pas rester sur un échec et travailler collectivement pour rebondir.
Outiller les équipes
- Impliquer les directions sur le terrain pour donner l’exemple,
- Clarifier les missions des équipes dans la négociation,
- Apporter des compétences techniques et un soutien RH (AFEST, POEI, contrats passerelles).
Changer de regard sur l’insertion
- Déconstruire les préjugés liés à l’insertion,
- Se centrer sur les compétences réellement attendues,
- Identifier et valoriser les atouts des salariés en transition professionnelle (STP).
Sécuriser les parcours et rassurer les entreprises
- Suspension de contrats CDDI pour sécuriser les parcours,
- Suivi en emploi, PMSMP, mises à disposition,
- Réactivité des SIAE et capacité à adapter les horaires ou les conditions de prise de poste,
- Équité dans l’accompagnement de l’entreprise et du salarié.
Des pistes à expérimenter
Plusieurs pistes innovantes ont également émergé :
- Mutualiser les besoins de plusieurs entreprises,
- Questionner les besoins quotidiens pour ajuster les horaires,
- Renforcer l’argumentaire auprès des entreprises (témoignages, supports, livre d’or),
- Clarifier le cadre de l’accompagnement avant, pendant et après l’embauche,
- Valoriser les recruteurs et laisser les équipes agir selon leurs appétences,
- Mettre en place des actions de parrainage pour les salariés sortis.
Les enseignements de l’APEC et de la DARES, croisés avec l’expertise des directions SEVE, convergent vers une même conclusion : les difficultés de recrutement appellent une évolution des pratiques. La négociation, loin d’être un renoncement, est un outil stratégique pour construire des recrutements durables, sécuriser les parcours et répondre aux besoins des entreprises.
Chez SEVE, nous sommes convaincus que la médiation active et la coopération avec les employeurs sont des clés essentielles pour un marché du travail plus fluide, plus réaliste et plus inclusif.